Saisir en une rencontre toute l’essence d’un candidat est un art délicat, qui demande un peu de méthode et beaucoup d’humanité.
Pour voir la « vraie couleur » d’un candidat, la meilleure approche reste encore de le rencontrer sans avoir de poste précis à lui proposer, explique Éric Mallette, associé et vice-président au développement de l’équipe à La tête chercheuse. Fidèle à cette philosophie, ce gros cabinet de chasseur de têtes montréalais organise 95 % de ses rencontres avec des chercheurs d’emploi sur une base exploratoire.
Le principe, c’est de se constituer un vivier de candidats à qui l’on proposera possiblement un poste en accord avec leur profil, plutôt que de se mettre à la recherche de quelqu’un au moment de pourvoir rapidement un poste dans une entreprise. « De cette manière, explique M. Mallette, le candidat n’est pas biaisé par ce qu’il sait ou ce qu’il espère de l’emploi et de l’employeur convoités. Il se présentera sans orienter ses réponses. »
Organiser une rencontre dans le bon contexte et au bon moment est donc un premier point essentiel. Afin de mettre cette entrevue pleinement à profit pour bien cerner le candidat, qui est autant une personne qu’une force de travail, M. Mallette recommande de le considérer selon trois pôles :
Son savoir-faire et ses connaissances
Les compétences techniques sont évidemment fondamentales dans l’appréciation d’un candidat, sauf que les recruteurs s’y arrêtent trop souvent, déplore M. Mallette. « C’est probablement parce que ce sont des informations plus simples à recueillir et à analyser, plus objectives. Pourtant, les dépasser pour comprendre le savoir-être de la personne que l’on rencontre est tout aussi important. »
Son arrimage culturel
L’arrimage culturel, c’est l’histoire de la personne dans sa globalité, pas seulement celle du candidat. C’est l’héritage et le parcours qui permettent de bien comprendre ce qui l’anime. Cet aspect est essentiel, car si les valeurs de l’employeur et de l’employé ne concordent pas, la relation professionnelle a toutes les chances de tourner court très rapidement. Négliger l’arrimage culturel au profit des seules compétences expose au risque d’envoyer un pacifiste dans une usine d’armement, pour la simple raison qu’il maîtrise un logiciel qui permet de dessiner aussi bien des éoliennes que des missiles.
Sa motivation
Trop souvent la parente pauvre du processus de recrutement, c’est pourtant la qualité qui peut permettre de boucher bien des trous dans un CV. « Imaginez que vous ayez 80 % du profil requis pour le poste de vos rêves, explique M. Mallette. Mais comme vous désirez cet emploi assez fort, vous serez sans aucun doute prêt à acquérir les 20 % manquants. » Autrement dit, quand on veut, on peut. Et comme la main-d’oeuvre qualifiée se fait rare, cette idée fait de plus en plus son chemin chez les recruteurs, qui assouplissent leurs critères dans un marché du travail de plus en plus en faveur des candidats.
L’autre face d’un recrutement
Une fois que vous aurez fait le tour de ces trois pôles, vous pourrez considérer des postes pour le candidat. Ce sera alors le temps de prendre en compte qu’il n’est que la moitié de l’équation. « Un recruteur doit toujours travailler sur l’arrimage entre deux besoins, celui du candidat et celui de son client, l’employeur. C’est pourquoi je ne m’arrête jamais à la description du poste. Je creuse pour savoir comment est l’ambiance, l’environnement de travail, quelles sont les valeurs de l’entreprise et comment était la personne qui occupait ce poste auparavant », conclut M. Mallette.
Bref, ayez en tête qu’un candidat est bien plus que la somme de ses compétences.